Avec Corbyn, le Labour devient le premier parti en Europe en lutte contre l’austérité

Royaume-Uni : le manifeste très à gauche de Corbyn                http://www.labour.org.uk/index.php/manifesto2017

Le chef du parti travailliste britannique, Jeremy Corbyn, pose avec en main un exemplaire du programme du Labour, à Bradford (nord de l’Angleterre), le 16 mai 2017.
Le chef du parti travailliste britannique, Jeremy Corbyn, pose avec en main un exemplaire du programme du Labour, à Bradford (nord de l’Angleterre), le 16 mai 2017.PAUL ELLIS / AFP
  • Cap à bâbord ! En vue des élections législatives anticipées du 8 juin, le chef du parti travailliste britannique, Jeremy Corbyn, a présenté mardi à Bradford (nord de l’Angleterre) un programme résolument ancré à gauche. Objectif : combler l’écart, pour l’heure important, avec les conservateurs de la première ministre Theresa May.
  • Ce texte, amendé par rapport à la version originelle qui avait « fuité » dans les médias la semaine dernière, prévoit un large éventail de mesures en accordance avec la matrice idéologique du Labour. Parmi elles figurent des nationalisations (de l’eau, de la poste et du rail), l’augmentation des impôts pour les plus fortunés, de lourds investissements publics ou encore la suppression des frais d’université.BBC
  • Comme l’a exposé M. Corbyn en préambule de son discours, il s’agit de briser la pérennité d’un système « défavorable au plus grand nombre » et de « bâtir un pays dans lequel nous investissons notre richesse afin de donner à chacun les meilleures chances de réussite ». Une volonté protectrice qui transpire de part en part, parce que « tout citoyen doit être en sécurité au travail et chez lui, doit être payé décemment pour son activité et doit vivre avec la dignité qu’il mérite ».
  • Pour le tabloïd Daily Mail, les intentions du dirigeant travailliste de vampiriser les riches et de donner davantage de pouvoir aux syndicats reflètent un très net virage à gauche, peut-être le plus radical depuis des décennies. La preuve ? Un langage qui rappelle celui de la lutte des classes. Cette rhétorique enflammera peut-être ses partisans, mais elle aura du mal à convaincre au-delà, analyse le Guardian.
  • Le pari de Jeremy Corbyn est-il tenable ? Les experts sont sceptiques, affirmant que la charge fiscale atteindrait son niveau le plus élevé en soixante-dix ans – près de cinquante milliards de livres sterling (environ 58 milliards d’euros au cours actuel). Ils jugent, en outre, très improbable le fait que les sommes espérées puissent être levées effectivement car les entrepreneurs seraient tentés de quitter le pays pour des cieux économiques plus cléments.
  • Dans un éditorial, le quotidien The Independent l’affirme sans détour, avec une pointe d’ironie : le manifeste du Labour eût été parfait… dans le cadre de la précédente élection. Il nécessiterait en effet un énorme investissement de temps et d’énergie de la part d’un gouvernement qui aurait déjà beaucoup à faire pour gérer le Brexit (la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne).
  • L’agence Bloomberg se veut encore plus acerbe. A ses yeux, ce dont le pays a besoin, c’est d’une opposition constructive, qui défie et stimule le gouvernement de manière efficace, pas d’une opposition qui ramène le pays au socialisme des années 1970. (Le Monde 18 mai 2017)

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Le programme fiscal du Labour ou comment financer services publics et protection sociale (17 mai 2017 – Le Monde) :

Labour : un programme résolument à gauche

Le leader du Labour Jeremy Corbyn, au centre, avec son cabinet fantôme (de gauche à droite : Diane Abbott, Ian Lavery, Kate Osamor, Tom Watson et Sarah Champion), à Bradford, le 16 mai 2017.
Le leader du Labour Jeremy Corbyn, au centre, avec son cabinet fantôme (de gauche à droite : Diane Abbott, Ian Lavery, Kate Osamor, Tom Watson et Sarah Champion), à Bradford, le 16 mai 2017. DANNY LAWSON / AP

Dans un discours à l’université de Bradford (nord de l’Angleterre), le leader de la principale formation d’opposition britannique, Jeremy Corbyn, a présenté mardi son programme pour les législatives, qu’il a qualifié de« programme de l’espérance » visant à « gouverner pour le plus grand nombre ». Il a promis une augmentation du salaire horaire minimal à 10 livres (11,72 euros) à l’horizon 2020, et la suppression des frais universitaires, sous un tonnerre d’applaudissements de l’assemblée, composée de nombreux étudiants. Le dirigeant travailliste a confirmé sa volonté de nationaliser les secteurs des transports, de l’énergie, de l’eau et le Royal Mail, l’opérateur postal du pays, privatisé en 2013. Le Labour s’est aussi engagé à augmenter de 30 milliards de livres (35,17 milliards d’euros) sur cinq ans les fonds attribués au NHS, le service public de santé, et de 1 milliard de livres (1,17 milliard d’euros) les dépenses sociales la première année.

Pour financer ces mesures, Jeremy Corbyn a annoncé qu’il mènerait une importante réforme fiscale visant à taxer davantage les entreprises et les particuliers les plus aisés. Le taux marginal d’imposition serait ainsi porté à 45 % (contre 40 % actuellement) pour les revenus annuels supérieurs à 80 000 livres (94 000 euros), et à 50 % (45 % actuellement) pour les revenus supérieurs à 123 000 livres (144 000 euros). Afin de réduire les inégalités qui minent, selon Jeremy Corbyn, la société britannique, le Labour souhaite également augmenter progressivement l’impôt sur les sociétés à 26 % (contre 19 % actuellement), et taxer les entreprises qui versent des salaires annuels supérieurs à 330 000 livres (387 000 euros).

Jeremy Corbyn a également promis de « mener à bien le Brexit tout en faisant de la préservation des emplois la priorité », brocardant les Tories de la première ministre, Theresa May, « parti des discriminations » qui a gouverné « pour les riches, l’élite et les intérêts particuliers (…) ces sept dernières années ». « Le Labour a rappelé aujourd’hui aux gens la raison de son existence », a réagi Joe Ashton, un fonctionnaire local de 29 ans, un militant. « C’est un programme radical sans être extrême, censé, chiffré et qui enthousiasme les gens », a-t-il déclaré à l’AFP. Dans les sondages, le Labour est cependant distancé de près de 20 points par les Conservateurs. Les Tories ont eux immédiatement qualifié le programme d’« insensé » et mal chiffré.

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La conférence du nouveau Labour (parti travailliste britannique) à la façon Corbyn et quelques compte-rendus, avec un article deRichard Murphy, le conseiller de l’ombre, issu de Tax Justice Network

Corbyn Labour Conference

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