BELGIQUE : baisse de l’effectif des contrôleurs fiscaux – Malaise chez les contrôleurs du fisc

Alexandre De Croo l’avoue : les effectifs du contrôle à l’ISI sont en baisse ! (5/11/19)

de Laurent Lambrecht – La Libre Belgique

Au sein de l’Isi, la section qui traque la fraude fiscale grave, les effectifs de contrôle sont passés de 487 à 443 agents en trois ans et demi, soit une perte de 9%.

C’est une information très intéressante qu’a livrée le ministre des Finances, Alexander De Croo (Open VLD), à l’occasion d’une réponse écrite adressée au député fédéral Marco Van Hees (PTB). Selon les chiffres communiqués par le ministre De Croo, les effectifs du SPF Finances, dédiés au contrôle fiscal, ont sérieusement diminué ces dernières années. Cette réduction concerne à la fois l’Inspection spéciale des impôts (Isi), les douanes et accises, ainsi que l’AG Fisc.

Au sein de l’AG Fisc, la section chargée du contrôle fiscal ordinaire des particuliers, des indépendants, des PME et des grandes entreprises, le nombre de fonctionnaires chargés du contrôle fiscal a baissé de 13% en trois ans. On est passé de 2.870 agents, au 1er juillet 2016, à 2.501 agents, au 30 juin 2019, soit une baisse de 369 contrôleurs en trois ans.

Ces chiffres sont intéressants puisqu’ils portent sur les années postérieures à la vaste réforme intervenue en 2016 au sein du SPF Finances (voir ci-contre). Cette diminution des effectifs porte donc sur des années comparables entre elles.

« Le prédécesseur d’Alexander De Croo, Johan Van Overtveldt, avait déclaré que la diminution du personnel du SPF Finances ne toucherait pas les agents remplissant une fonction de contrôle, regrette Marco Van Hees. Ces chiffres dévoilés aujourd’hui montrent que ce n’est pas du tout le cas ».

En effet, une plongée dans les archives des débats à la Chambre montre que l’ancien ministre des Finances avait pris l’engagement de ne pas réduire le nombre de contrôleurs fiscaux. « Afin de ne pas diminuer les capacités de contrôle de l’administration fiscale, j’ai demandé au gouvernement et obtenu de sa part le remplacement 1/1 des fonctions de contrôle au sein du SPF Finances », avait déclaré Johan Van Overtveldt (N-VA), en juin 2018.
L’Isi trinque aussi
En outre, au sein de l’Isi, la section qui traque la fraude fiscale grave, les effectifs de contrôle sont passés de 487 à 443 agents en trois ans et demi, soit une perte de 9?%.
L’on constate la même évolution au sein de l’administration des douanes et des accises. Et cela sur un laps de temps encore plus réduit. En deux ans, les effectifs de contrôle sont passés de 835 à 756 agents, soit une baisse de 9?%.

Les résultats des contrôles fiscaux font l’objet d’une grande attention de la part des médias et du monde politique. Ils sont aussi souvent sources de polémique, les partis de gauche dénonçant régulièrement le manque de volonté des partis de droite de s’attaquer réellement à la fraude fiscale.

Comment expliquer cette évolution depuis 2016?? « L’administration met tout en oeuvre pour orienter ses ressources vers les activités de contrôle, peut-on lire dans la réponse d’Alexander De Croo. Cela étant, elle doit également, et en premier lieu, veiller à assurer le traitement des déclarations fiscales, ainsi que la prestation de services et le contentieux qui y sont liés ».

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L’Echo  9/5/16

Le nombre de contrôles fiscaux a fondu en Belgique

Jean-Yves Klein Et Benoît Mathieu    9 avril 2016

 De 2010 à 2014, nombre d’indicateurs ont valsé dans le rouge.

Avec ces « Panama Papers » qui ont rythmé la semaine et un gouvernement fédéral à la recherche de milliards pour remettre à flot son budget, handicapé notamment par la faiblesse des recettes fiscales, les projecteurs se braquent à nouveau sur la lutte contre la fraude fiscale.

Or qu’observe-t-on en Belgique? Les effectifs du SPF Finances se réduisent d’année en année – mais c’est en partie lié à la digitalisation des processus. Plus interpellant: le nombre de contrôles effectués par le fisc a sévèrement reculé entre 2010 et 2014. Et forcément, les montants en provenance des redressements fiscaux ont suivi la même tendance.

Autre enseignement des chiffres en provenance de l’administration générale Fiscalité: quand il s’agit de choisir un dossier devant faire l’objet d’un contrôle, les agents du SPF Finances s’en sortent mieux que leurs ordinateurs.

Au sein de l’Inspection spéciale des impôts (ISI), le « data mining » pose aussi question. S’il est indispensable pour détecter des réseaux frauduleux de grande ampleur, il est parfois encombrant et moins efficace que le traitement individuel des dossiers sur la base des informations de terrain. Surtout, des goulots d’étranglement rendent l’engagement récent de 100 personnes partiellement inutile pour l’instant. Résultat: alors qu’on a découvert le scandale du siècle au Panama, les super-contrôleurs du fisc sont, bien malgré eux, en partie désoeuvrés. Lire en pages 42 et 43

http://journal.lecho.be/#detail/9752955

 

Très intéressante infographies détaillant tout cela dans L’Echo de ce week-end (2 pleines pages)!

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Les impôts, c’est pour les pauvres

Editorial – Joan Condijts, Rédacteur En Chef

Si l’évasion fiscale est un droit, l’équité fiscale est un devoir d’Etat. Aujourd’hui, comme le révèle – une nouvelle fois après le « Swissleaks » et le « Luxleaks » – l’affaire des « Panama papers », la première s’est érigée en sport de luxe tandis que la seconde tient davantage du slogan, sinon témoigne de l’impuissance politique. Le toléré n’est cependant plus tolérable…

Des millions d’Européens acquittent leurs impôts via les prélèvements sur le travail. Soit de manière automatique. Sans latitude aucune quant à cette fameuse « voie la moins taxée » que le législateur a consacrée et que d’aucuns, libertaires, défendent avec véhémence. Une liberté fiscale dont seule une minorité profite désormais. Cette iniquité manifeste participe au déséquilibre social, à la perte de confiance en l’institution politique, voire plus globalement en la chose publique. De surcroît, selon les Nations unies, une centaine de milliards de dollars d’impôts théoriques échapperaient annuellement aux Etats dits « développés » par le biais des paradis fiscaux.

Organiser une riposte légale à l’évasion fiscale se révèle une urgence politique. Afin de recréer un équilibre entre cette masse salariée qui n’a guère le choix et une minorité, aussi infime soit-elle, qui se soustrait légalement à ses obligations sociales.

Nier cette inégalité de traitement nourrit les fantasmes. Nul ne peut s’exonérer de ses responsabilités sociales. Ni le nanti qui pense ne rien devoir à la société parce que ses moyens lui donnent l’illusion de ne pas en dépendre, oubliant toutes les infrastructures collectives dont il profite. Ni le défavorisé qui estime que la société lui doit tout sans avoir le droit de lui demander des comptes.

L’équilibre social est à ce prix. Le législateur en est le gardien et ne peut accepter que, peu à peu, s’installe cette conviction populiste que l’impôt ne serait que pour les pauvres…

 

http://journal.lecho.be/#detail/9752959

 

 

 

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