Pauvreté : En Belgique, les seniors voient leurs revenus augmenter mais 15% de la population sous le seuil de pauvreté; en 6 mois, 70.000 personnes ont perdu leur allocation en 2015 – En France, une légère progression de la pauvreté

 Une communication de P.Defeyt – « Si le taux de pauvreté global pour la Belgique reste stable au cours des années, rappelait il y a peu Statistics Belgium, nous pouvons néanmoins remarquer une évolution intéressante sur le long terme : la diminution du risque de pauvreté chez les personnes âgées de 65 ans et +. Le taux de pauvreté des seniors est, en effet, passé de 21% en 2004 à 15% en 2015 après avoir connu un pic à 23% en 2006. Pour la première fois depuis 2004, le taux de pauvreté des personnes âgées est donc comparable au taux de pauvreté de la population globale. Deux facteurs peuvent expliquer cette diminution : la revalorisation des pensions minimums et la participation accrue des femmes au marché du travail, qui perçoivent ainsi des pensions plus élevées.

On remarquera en outre que la baisse du taux de pauvreté est plus marquée pour les femmes (-9% entre 2006 et 2015) que pour les hommes (-7%).

La comparaison avec l’évolution du taux de pauvreté d’une sélection de pays européens permet de constater que la « performance » belge n’a rien d’exceptionnel :

  • on observe un recul du taux de pauvreté des seniors au niveau de l’UE 15, du même ordre de grandeur
  • l’écart (absolu) entre le taux de pauvreté des seniors et celui des moins de 65 ans se réduit en Belgique comme au niveau de l’UE15.

Ceci dit, on peut s’étonner de l’étonnement suscité de ci ou de là par cette bonne nouvelle pour les seniors belges. Il existe en effet de nombreuses indications, statistiques ou qualitatives, qui montrent l’amélioration – absolue et relative – de la situation financière des seniors.

La dernière note de l’Institut pour un Développement Durable présente et analyse des indicateurs, moins connus, qui permettent d’illustrer et de comprendre ce qui se passe depuis une dizaine d’années.

On fera d’abord remarquer que la double évolution baisse du taux de pauvreté des seniors/stabilité du taux de pauvreté global a forcément comme corollaire une augmentation du taux de pauvreté des moins de 65 ans, de l’ordre de 2 % entre 2006 et 2015. Ce résultat là, plus dérangeant, est moins mis en évidence…

C’est à une redistribution intergénérationnelle des revenus, massive, que l’on assiste donc ; l’ampleur de cette redistribution est quelque peu atténuée par la baisse, à partir de 2009, de la part des revenus de la propriété dans le total des revenus primaires (on sait en effet que les personnes âgées ont une part proportionnellement très élevée des revenus de la propriété).

Les statistiques fiscales illustrent très bien cette redistribution.

Principaux constats sur base des statistiques fiscales :

  • la part des 65 ans et plus dans le revenu imposable total augmente, bien plus vite que leur part dans la population
  • entre 2005 et 2013 le revenu moyen par contribuable a augmenté de 3.000 €/an pour les plus de 65 ans contre 1.000 €/an seulement pour les moins de 65 ans
  • les « jeunes » pensionnés (les 65-69 ans) ont un revenu imposable moyen de 30% supérieur à celui des 85 ans et +
  • l’écart de revenus entre les « arrivants » et les plus anciens pensionnés ne cesse d’augmenter, ce qui traduit l’arrivée progressive des pensionnés qui ont « profité » à plein des évolutions socioéconomiques de l’après-guerre, en particulier des fortes hausses de salaires jusqu’à la fin des années 70.


Les statistiques des pensions indiquent des évolutions semblables mais peuvent aussi étonner. Que peut-on en déduire ?

  • la masse des pensions versées aux 65 ans et + a augmenté, en termes réels, de 37% entre 2005 et 2014 (NB : Cette progression est calculée en tenant compte de ce qu’une partie des pensions est versée à des moins de 65 ans ; aujourd’hui environ 10% des pensions des salariés et indépendants et environ 25% des pensions publiques bénéficient à des moins de 65 ans)
  • entre 2005 et 2013, la masse des revenus imposables des 65 ans et plus a augmenté comme la masse des pensions
  • globalement, les « jeunes » pensionnés ont, en moyenne, des pensions supérieures à celles des 85 ans et + ; la place croissante des pensions publiques y est pour beaucoup (proportionnellement plus de pensions publiques et ces pensions ont des écarts 65-69 versus 85 et + plus grands) ;
  • cependant, ce n’est pas le cas des femmes dans le secteur des salariés et indépendants ; ceci veut dire que, pour le moment, les pensionnées salariées et indépendantes de 65-69 ans ont, en moyenne, une pension inférieure à celle des 85 ans et +; l’explication : les pensionnées très âgées sont proportionnellement beaucoup plus nombreuses à vivre d’une pension de survie et ou de retraite et survie, pensions relativement plus élevées
  • on remarquera, c’est important pour l’avenir, que le rapport des pensions des femmes « isolées » de 65-69 ans aux pensions « isolées » des 85 et + est lui supérieur à 1.


Les statistiques des pensions des salarié(e)s et indépendant(e)s permettent également de mettre en évidence un important bouleversement concernant les femmes : l’augmentation très rapide de la proportion de pensionnées qui ne vivent que de droits strictement propres (c’est-à-dire des pensionnées qui ne dépendent ni d’une pension au taux ménage de leur mari, ni en rien d’une pension de survie) ; entre 2006 et 2015, le pourcentage global passe de 31 à 40% (de 44 à 62% pour les 65-69 ans).

Enfin, les statistiques des prestations permettent de rappeler les inégalités de genre et de régime de pension :

  • la pension moyenne du secteur public est plus de 2 fois plus élevée que celle du secteur des salariés et indépendants ;
  • la pension moyenne d’une femme représente un peu plus de 77% de celle d’un homme, et ce dans les deux régimes de pension.

Pension moyenne – en €/mois – estimations au 1er juillet 2016

On peut déduire de tous ces constats que la diminution du taux de pauvreté des seniors découle surtout de l’augmentation du nombre de pensionnés ayant, seuls ou à deux, des pensions supérieures au seuil de pauvreté, et pas, comme le suggère Statistics Belgium, de la revalorisation des pensions minimum ; il faut en effet tenir compte de ce que peu de carrières sont complètes, que les minima sont des montants bruts et que les minima pour les taux « ménage » des salariés et indépendants sont à tous les coups inférieurs au seuil de pauvreté. Le principal apport des femmes à la réduction du taux de pauvreté des seniors n’est pas (ou peu) à à trouver dans la hauteur de leur pension, qui reste médiocre ; mais elles sont plus nombreuses qu’avant à permettre, avec leur apport, au ménage dont elles font partie de dépasser le seuil de pauvreté.

La situation – absolue et relative – des pensionnés va continuer à s’améliorer, pour un temps encore. C’est une évidence. Mais, toutes choses égales par ailleurs, à un rythme ralenti ; en outre, des mesures ont été prises au cours des dernières années (ou sont en préparation) qui vont elles aussi progressivement infléchir cette amélioration.

Il faut aussi rappeler que les données utilisées ici sont des moyennes et l’on sait que de nombreux pensionnés sont en difficultés, parfois (très) lourdes. On pense par exemple aux petits pensionnés qui sont locataires mais surtout à tous les pensionnés qui doivent faire face aux conséquences d’une perte d’autonomie, conséquences coûteuses s’il en est, même quand on peut rester au domicile.

Plus de développements dans la note jointe.

A votre disposition.

Bien à vous.

Philippe Defeyt
047/906.365

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http://www.rtbf.be/info/economie/detail_un-million-600-mille-belges-vivent-sous-le-seuil-de-pauvrete?id=8939352

En Belgique, en 2015 après avoir exclu du chômage et dans un contexte économique toujours à l’arrêt …

70.000 personnes ont perdu leur allocation en 2015

Plus de 70.000 personnes ont perdu leur allocation de chômage en 2015 affirme le syndicat socialiste FGTB mardi dans un communiqué. Ce chiffre est considéré par l’Onem comme une estimation. Le bilan officiel est attendu dans quelques semaines. Il concerne tant les chômeurs sanctionnés que les exclus des allocations d’insertion et les jeunes privés du droit aux allocations.

Selon les estimations de chômage, environ 40.000 personnes ont été sanctionnées cette année parce qu’ils ne fournissaient pas un effort suffisant pour retrouver un emploi. Environ 30.000 autres personnes ont été exclues du bénéfice des allocations d’insertion, en vertu d’une décision prise sous le gouvernement Di Rupo, ajoute la FGTB.

C’est « un triste record! Il n’est pasauvreté étonnant que le nombre de personnes faisant appel aux CPAS ne cesse d’augmenter mois après mois », déplore la FGTB.

http://www.sudinfo.be/1448100/article/2015-12-19/la-pauvrete-explose-en-belgique-avec-une-hausse-de-113-en-six-mois?google_editors_picks=true

En France, la cause première est le chômage et les enfants restent nombreux à être touchés  … ici le rapport de l’INSE pour 2014 :

http://www.insee.fr/fr/themes/document.asp?ref_id=ia23

http://www.lemonde.fr/economie-francaise/article/2015/12/22/en-france-la-pauvrete-a-legerement-augmente-en-2014_4836778_1656968.html

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